DH – 25/10/2016 – Les sectes toujours bien présentes en Belgique
27 octobre 2016
Depuis les années 90, l’Observatoire des sectes a reçu près de 1.000 demandes et questions.
La DH vous l’indiquait dans un article la semaine passée : depuis les attentats qui ont récemment frappé la Belgique , à la Sûreté de l’État, la lutte contre le terrorisme a éclipsé la lutte contre les organisations sectaires. Malheureusement, plusieurs groupes jugés inquiétants par les observateurs prospèrent encore dans notre pays.
Depuis sa création dans les années 90, le CIAOSN – Centre d’information et d’avis sur les organisations sectaires nuisibles, appelé parfois plus simplement Observatoire des sectes – a reçu près de mille demandes et questions concernant des groupes sectaires.
Outre les courants habituels comme la Scientologie et les Témoins de Jéhovah, d’autres organisations moins connues se sont fait récemment remarquer par leur activisme sur notre territoire. Il n’existe pas de liste des sectes en Belgique mais le député André Frédéric (PS), fondateur de l’association de défense de victimes de sectes, en dénombre quelques-unes.
Parmi elles, l’association Sûkyo-Mahikari-Lumière de Vérité, plus connue sous le nom de Mahikari. Le groupe prétend « purifier tout homme et l’univers en transmettant la Lumière divine par la paume de la main ». Une bien jolie formulation pour désigner une secte guérisseuse accusée de détournements de fonds, d’escroquerie et de mettre la santé de ses adeptes en danger.
Un des groupes les plus dangereux actuellement est celui de Sahaja Yoga. Contacté à plusieurs reprise à son sujet, le CIAOSN avait rendu un avis sur ce mouvement, avertissant le public sur l’autoritarisme et l’absolutisme du courant. Un des éléments les plus préoccupants de cette secte est la conception qu’ils ont des enfants : considérés comme la personnification du diable, ils doivent être éloignés de leurs parents pour être formés dès leurs 3 ans dans des sortes d’internats gérés par l’association. Sahaja Yoga compte près d’un millier d’adeptes dans notre pays.
Le groupe Moon est également qualifié de secte par plusieurs associations. Il est accusé d’utiliser des procédés de recrutement comparables à un lavage de cerveau.
Les organisations dites néo-pentecôtistes inquiètent aussi. Certaines d’entre elles imposent à leurs adeptes de leur verser dix pour cent de leurs revenus.
Parmi les nouveautés, le Temple de l’Ordre Jedi, inspiré par l’univers de Star Wars, attire de plus en plus l’attention des observateurs.
Cité régulièrement dans les médias, le Père Samuel se présente en tant que guérisseur de tous les maux. Il a été accusé d’attouchements, d’escroquerie et d’abus de faiblesse.
Ma. Be.
« Nous sommes tous des cibles potentielles »
S’il n’existe pas de profil type pour les victimes de sectes, certaines tendances peuvent toutefois être dégagées
Sandrine Mathen est psychologue et analyste au CIAOSN (Centre d’information et d’avis sur les organisations sectaires nuisibles). Pour elle, il n’existe pas de profil type en ce qui concerne les victimes de sectes. Elle distingue cependant plusieurs catégories de personnes qui peuvent présenter un risque accru de tomber sous l’emprise d’un groupe sectaire.
1 Elle évoque ainsi en premier lieu des personnes qui sont dans une » phase de recherche spirituelle. « Ce sont des personnes qui souhaitent combler un besoin de croire. Elles ne présentent pas forcément de problème particulier mais peuvent, à travers des rencontres, établir des contacts qui peuvent paraître anodins dans un premier temps puis se révéler problématiques. »
2 Un autre cas de figure évoqué par la psychologue et analyste est celui des personnes fragiles, soit momentanément parce qu’elles traversent une période difficile (par exemple lors d’un deuil, de difficultés professionnelles ou qui traversent une crise existentielle), soit de longue durée. « Ça peut concerner tout le monde. Ce sont des personnes fragiles qui peuvent se trouver à la merci d’une offre déviante. Ces personnes peuvent bien ou mal tomber selon les cas », explique-celle. Nous sommes donc tous des cibles potentielles.
3 Une troisième catégorie de personnes qui peuvent présenter un plus grand risque de subir l’influence de groupes sectaires sont les personnes qui sont dans un mal-être depuis longtemps. « Certaines personnes naissent avec une propension à la dépression. Certaines vont s’enfoncer de plus en plus et d’autres vont faire de bonnes rencontres qui vont les aider à s’en sortir », constate la psychologue.
Pour finir, la chercheuse évoque une quatrième catégorie : les personnes qui ont une tendance psychotique. Mais ce cas de figure est très minoritaire parmi les victimes de sectes.
Ma. Be.
« Ma famille ne m’adresse plus la parole »
Alexandre est né parmi les Témoins de Jéhovah. Il a quitté la secte à 25 ans malgré la pression de ses proches.
Alexandre Cauchois, 41 ans, a passé les 25 premières années de sa vie parmi les Témoins de Jéhovah. Dégoûté par les contraintes imposées par cette secte, il l’a finalement quittée en 2001. « Je suis né avec une vie sans avenir. On n’arrêtait pas de me dire que de toute façon, le monde allait disparaître. Depuis ma naissance, on m’explique que Dieu va intervenir demain. »
Tout petit déjà, les règles imposées par le statut de témoin de Jéhovah ont fait de lui un enfant à part, « j’étais totalement différent des autres, j’étais le seul témoin de mon école et dès la première semaine de ma scolarité, mes parents ont convoqué mon institutrice et le directeur de l’école pour les avertir que je ne pouvais pas fêter Noël et Pâques et qu’il faudrait prévoir d’autres activités pour moi. Pendant que tous mes camarades faisaient des coloriages de sapin, moi, je devais faire autre chose », évoque-t-il.
À six ans à peine, son père le pousse à commencer le porte à porte, symbole emblématique de cette secte.
« Je me souviens encore très bien du jour où mon père m’a dit que c’était à mon tour. J’avais un dépliant à la main, mon père toque à la porte et me dit d’y aller. Un grand monsieur de 40 ans, beaucoup plus fort que mon père, ouvre et se met à hurler parce qu’il trouve ça incroyable qu’on incite un enfant à faire du prosélytisme. Pour moi, c’était un grand choc et ça m’a permis de réaliser qu’il y avait un décalage entre ma vie de tous les jours et le reste de la société. »
Après cette première prise de conscience, la vie d’Alexandre se poursuit parmi les Témoins, rythmée entre les séances de porte à porte et les réunions auxquelles il est obligé d’assister chaque semaine.
À dix ans, il se retrouve confronté violemment à une des interdictions les plus sévères imposées aux témoins : celle de la transfusion sanguine, alors qu’il subit une opération du pied.
« J’étais dans ma chambre d’hôpital et je me souviens de mon père qui me tend un document qu’il me demande de signer. C’était une décharge stipulant que j’étais prêt à mourir plutôt que d’accepter une transfusion. »
Vient ensuite l’adolescence, faite de tabous, de privations et de violences psychologiques.
« C’est bien simple, tout est interdit ! On n’a pas le droit d’écouter Michaël Jackson, de boire de l’alcool, de draguer. ..On se sent tout le temps surveillé », décrit-il.
À 25 ans, Alexandre décide de quitter les Témoins de jéhovah en 2001 . Une décision difficile que les adeptes ont tenté de contrer. « Du jour au lendemain, plus personne n’avait le droit de m’adresser la parole parmi les Témoins. »
Alexandre se retrouve complètement isolé et même sa sœur, qui était aussi sa meilleure amie, lui tourne le dos. Le but de cette règle cruelle ? Faire souffrir la personne afin de la faire revenir dans la secte.
Mais malgré les pressions Alexandre n’a pas flanché. Il vit désormais des Témoins de Jéhovah et a écrit un livre dans lequel il partage son expérience.
Le temple de l’Ordre Jedi pour religion
Inspiré de la saga Star Wars, le Temple de l’Ordre Jedi se présente comme une religion. Le mouvement est même reconnu officiellement aux États-Unis. Ses adeptes sont plus de 500.000 dans le monde, majoritairement dans les pays anglo-saxons.
Lors d’un sondage réalisé au Royaume-Uni, l’ordre du Jedi arrivait en quatrième place derrière le christianisme, l’islam et l’hindouisme. Pour les adeptes de ce nouveau culte, la Voie Jedi n’existe pas uniquement dans une galaxie lointaine. C’est surtout un mode de vie, voire une philosophie.
La médiation comme appât
Parmi les pratiques considérées comme sectaires par l’Aviso, on retrouve la méditation transcendentale de Maharishi Mahesh Yogi. Fondée par un gourou en 1958, la méditation transcendentale a donné lieu à plusieurs écoles et universités à travers le monde. Le mouvement de Maharishi Mahesh Yogi revendique 5 millions d’adeptes à travers le monde et possède des intérêts dans l’immobilier et les cosmétiques. II fait la promotion du vol yogique, consistant à faire des petits bonds en position du lotus.
Les sectes rassemblent certains critères
Ii n’y a pas de liste officielle des sectes en Belgique. II existe cependant certains critères qui peuvent indiquer qu’on a affaire à un groupe à tendance sectaire.
L’exercice d’un contrôle et le rejet du libre arbitre en font partie.
Les groupes sectaires se caractérisent généralement par une hiérarchie stricte et par une, série de pratiques et rituels spécifiques.
Une rupture et un isolement avec le reste du monde sont également des indices rencontrés fréquemment.
Ces critères ne sont pas les seuls et ils ne doivent pas être tous rencontrés pour établir le caractère sectaire, mais ils peuvent déjà constituer des signaux d’alerte.
Ma. Be
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