EDITO – JANVIER 2017
31 janvier 2017
En ce début d’année 2017, il faut vraiment avoir ce qu’on appelle la foi du charbonnier, c’est-à-dire cette sorte de conviction absolue et quelque peu naïve, pour ne pas céder au découragement.
Pour notamment se convaincre de l’utilité de poursuivre, inlassablement, nos actions de prévention – amplifiées récemment autour du phénomène de la radicalisation -, tant auprès des collégiens et lycéens qu’auprès des professionnels, afin qu’ils soient à même de comprendre et d’anticiper le mécanisme et les dommages particuliers de l‘emprise sectaire susceptibles d’atteindre tout un chacun.
Nous avons, ainsi, en moins de trois ans, mené plusieurs centaines d’actions de prévention, qui ont touché plusieurs milliers de personnes. Nous avons également collaboré à la rédaction de nombreux articles ou émissions de la presse écrite, radiodiffusée et télévisée.
Or malgré cela, les familles sont toujours aussi nombreuses à solliciter l’aide de notre centre après avoir été piégées, soit par un groupe soit par un individu utilisant, sous couvert d’une offre d’apparence innocente (le bien être, la religion, le développement durable.. .), le mécanisme de l’emprise sectaire pour assoir son pouvoir sur ces familles. Ce constat fait, nous pourrions, personne ne pourrait nous en faire grief, céder au découragement face à l’ampleur de la tâche et à cette impression de ne servir finalement à pas grand-chose.…
Mais, nous n’en ferons rien car nous pensons que nos actions de prévention, et les informations que nous y donnons, sont en fait noyées dans cette sorte d’«immédiateté » qui gouverne et accélère de plus en plus le temps public, – celui du « scoop » et du « buzz »-, politique et médiatique, ainsi que le temps privé, le nôtre, accaparé par internet, les TV d’infos en continu et les réseaux dits sociaux. Des temps où les notions de délai et de réflexion n’ont plus cours, où l’information reçue ou consommée est immédiatement remplacée par une autre et ainsi de suite. Sans qu’aucune distinction ne soit possible entre elles. De sorte que, information pour information, tout semble se valoir, ce qui autorise toutes les dérives possibles.
Mais, nous n’en ferons rien, car fidèle à notre mission, nous nous honorons de pas succomber à cette « immédiateté » où tout se vaut, en nous donnant du temps au temps. En donnant du temps aux familles que nous accompagnons pour qu’elles puissent se poser et prendre le temps requis pour se reconstruire. C’est d’ailleurs ce qu’elles nous demandent comme l’atteste ce témoignage :« Je vais mieux, mais j’ai encore besoin de soutien, car les moments difficiles reviennent par petite vague ». Sortir d’une emprise, c’est presque comme un accouchement. S’il apparaît évident pour ce dernier que cela nécessite du temps, il en va de même pour la première. C’est tout un accompagnement. Aussi bien pendant qu’après. Il va sans dire que, ça n’a rien d’évident. C’est beaucoup d’énergie. De persévérance. De courage face aux difficultés inhérentes à ce chemin.
Chacun comprendra ainsi, à sa façon, que le temps ne peut se soustraire à la vie. Chacun sur son chemin a besoin de temps. Prenons le temps, de reconnaître cette nécessité. C’est se donner le droit légitime d’avancer à son rythme. C’est ainsi se respecter, valeur fondamentale directement bafouée lors de l’emprise sectaire.Se laisser le temps, le laisser aux autres, c’est permettre à chacun de retrouver la dose de sérénité et d’apaisement nécessaire pour se remettre d’une épreuve pareille ».
Un témoignage en faveur du « temps retrouvé » qui se termine par cette belle phrase…
« Le temps ne nous appartient pas, mais nous en disposons tous. »
…Qui nous guidera tout au long de l’année 2017. Bonne année à tous…